Sur tous les sites d’orientation professionnelle, sur toutes les plaquettes sur les métiers animaliers, sur tous les forums de passionnés en mal de reconversion professionnelle, le constat est placardé, répété, surligné : les places sont chères, le marché est saturé, devenez ébéniste ou astronaute, ça sera plus simple.
Il faut bien avouer que dans le domaine du conseil, du dressage, de l’éducation et de tout ce qui touche au bien-être animal, l’offre a tendance à sacrément s’étoffer ces dernières années. Educateurs, dresseurs, comportementalistes, psychozoologues, éthologues et autres appellations (déposées ou non) viennent désormais s’aligner aux côtés des traditionnels vétérinaires. Entre les soins alternatifs, les listes d’exercices, les vidéos techniques et les ouvrages scientifiques, il est parfois difficile de ne pas se noyer sous les informations pour quiconque recherche une relation
apaisée et harmonieuse avec l’animal qui partage sa vie.
Pourtant, quand j’entends des collègues se plaindre de cette évolution, j’ai plutôt tendance à être positive. Plus de professionnels, ça signifie plus d’émulation, des formations plus accessibles, l’organisation de colloques, la découverte de nouvelles méthodes (et des ouvrages étrangers enfin traduits !). Bref, c’est chouette. Et puis, quand on me dit qu’il y a très peu de places disponibles, j’ai toujours le réflexe de me dire que tant qu’il y en a une, rien n’est perdu… Surtout que je suis convaincue que l’augmentation du nombre de professionnels, si elle peut être un peu déroutante pour les propriétaires d’animaux, leur permet surtout de comparer, de consulter des praticiens d’approches complémentaires, de ne pas se sentir coincés dans une méthode sclérosante… et d’améliorer leur sens critique (ah, le pouvoir des débats Facebook…) !
« Tu voudrais pas leur demander comment on fait pour
convaincre un humain de nous laisser faire un nid tranquille ? »

 

Pourtant, force est de constater qu’il y a régulièrement des bouchons, ou du moins de sacrés ralentissements, une fois que l’on se rend sur le terrain. Malgré plusieurs séances avec des éducateurs certifiés, tel chien semble toujours perdu au contact de ses congénères. Après des mois de traitements et l’avis de plusieurs vétos et/ou comportementalistes, tel chat est toujours aussi excité au retour de son binôme humain en fin de journée. Alors que son cavalier a écumé toutes les chaînes Youtube disponibles et qu’il a investi dans des dizaines d’heures de cours avec un cavalier super médiatisé, son cheval cherche toujours à le désarçonner à chaque séance. Et les exemples sont nombreux…
En tant que professionnel.le contacté.e par un humain désemparé, la situation peut être intimidante, voire un peu troublante : pourquoi diable ce gentil poilu a-t-il été manipulé par trois véto et deux dresseurs sans que son humain ne trouve de réponse à ses questions ? Vais-je pouvoir les aider ? Sont-ils en train de me tester ? Sont-ce des espions à la solde de mes concurrents ?!? 😱 Les autres sont-ils passés à côté de quelque chose ? Ou est-ce que simplement, cet humain n’est pas vraiment prêt à changer et tente de « s’acheter une bonne conscience » en investissant dans ces séances sans remettre en cause son attitude une fois que j’ai tourné les talons ?
Si vous voulez travailler dans le domaine de l’aide aux humains et aux animaux, posez-vous les bonnes questions (si
vous ne supportez pas l’espèce humaine, épargnez-vous des années de sacrifice…
), testez et observez le métier qui vous attire (contactez des pro, tentez de faire des stages…) et lancez-vous !
Essayez de vous démarquer en vous formant régulièrement et évitez de vous reposer sur les lauriers d’un cours de 15h suivi à distance ou d’un diplôme d’état dont la dernière mise à jour date de la présidence de Giscard d’Estaing.
Pour gagner en compétence et en crédibilité, 
retour à l’école quasi-obligatoire !

Si vous cherchez de l’aide avec votre animal, usez et abusez du bouche-à-oreille et des réseaux sociaux, puis prenez connaissance de l’expérience ET des formations suivies par le professionnel courtisé. S’il vous semble génial mais qu’il n’est disponible que de 6h à 6h25 du matin lors du prochain équinoxe alors que vous vous débattez avec un chien menaçant ou un furet qui retourne votre appartement, peut-être serait-il judicieux de revoir quelques-unes de vos exigences.

Faire intervenir un professionnel dans votre binôme animal-humain, c’est entamer une relation à trois. Vous devez non seulement apprécier la personne qui vous guide et analyse votre situation, mais vous devez aussi vous assurer que votre partenaire se sent à l’aise en sa présence. Ainsi, même s’il y a des intervenants qui, à mon humble avis, devraient rapidement passer à autre chose (parce qu’ils mettent leurs clients – ou eux-mêmes ! – en danger, parce que leur niveau technique est à peine supérieur à celui de leurs élèves, parce qu’ils sont si bien empêtrés dans leurs certitudes qu’ils en oublient leur mission première…), je garde toujours espoir que les humains qui les ont contactés prendront conscience de la situation et oseront mettre fin au travail entamé s’ils constatent que leur animal n’y trouve pas son compte.  
Alors oui, si vous lancez une recherche Google des éducateurs de votre région, que vous cherchez à remplir votre agenda de jeune comportementaliste en deux semaines ou que vous ne supportez pas la concurrence, il y a peut-être « trop de professionnels ». Mais tant que je verrai des chiens dégommés en bout de laisse sur les trottoirs, des chevaux tiquer dans leurs boxes, des humains en larmes rêvant d’une relation équilibrée et d’une belle complicité avec leur animal… c’est qu’il y aura des places à prendre !
Le truc, c’est juste de trouver le bon intervenant ! 
Marie Sutter
Fondatrice et CEO d’AnimHo