Introduction
Conclusion

Chapitre 4 – Exercices statiques et au pas en carrière

1. Quand travailler lentement ?

Ce module se veut être un véritable éloge de la lenteur ! Parce que le cheval passe la très grande majorité de son temps à l’arrêt ou au pas lent, parce qu’il se nourrit, se déplace, créé et maintient des interactions sociales affines dans le calme, il est important de ponctuer nos interactions d’un peu plus d’immobilité et d’allures lentes.

Nos vies avancent à un rythme très différent de celui du cheval : nous sommes constamment en train de jongler avec nos emplois du temps, de chercher à concilier nos vies professionnelles et actives, de parcourir de plus en plus de kilomètres, d’emmagasiner toujours plus d’informations. Quand nous décidons d’aller voir notre cheval, c’est souvent parce que nous disposons d’un temps limité devant nous : un créneau entre deux rendez-vous, un aller-retour avant de reprendre nos rituels habituels. Bien sûr, pour notre partenaire équin, tout cela n’a aucun sens. La réalité de la relation interspécifique qui nous lie commence pour lui à votre arrivée aux écuries : ce que vous faites avant ou après n’a aucun écho dans son quotidien. Et c’est justement pour cette raison que c’est à VOUS de vous adapter à lui, et non l’inverse.

Plusieurs types de situation peuvent vous inciter à travailler plus lentement

  • Vous avez un jeune cheval / un nouveau cheval et vous voulez entamer votre relation de la manière la plus respectueuse possible.
  • Votre cheval vous fuit, il est sans cesse sur la défensive, vous n’avez aucune connexion au sol ou en liberté.
  • Votre cheval ou vous-même sortez de convalescence, vous devez prendre soin de votre santé et éviter les allures rapides.
  • Vos infrastructures sont occupées / le climat vous empêche de travailler (gel, neige…) et vous voulez profiter de votre visite a minima.
  • Vos séances se ressemblent de plus en plus, vous désirez sortir du rythme « marcher – trotter – galoper » et retour au pré.

Qu’elle que soit la raison qui vous incite à mettre plus de pas et d’arrêt dans votre travail : elle est bonne ! Pour un cheval, trotter et galoper de longues minutes d’affilée n’est pas inné et nécessite de la préparation, physique et mentale. Bien sûr, il est tout à fait possible d’avoir un cheval entraîné, capable d’évoluer sous la selle ou au sol de manière dynamique et cadencée. Mais rajouter de la lenteur à vos échanges ne sera jamais délétère, quel que soit votre niveau à tous les deux.

Notez cependant qu’un cheval qui longtemps travaillé dans le stress et dans la fuite en avant aura besoin de temps pour accepter de ralentir. Les allures rapides peuvent rapidement devenir un moyen de s’échapper, de ne plus réfléchir aux demandes de l’humain et de communiquer un mal-être. Si votre cheval a du mal à garder le pas, à respirer profondément et à s’ancrer à vos côtés, il vous transmet un message précieux…

2. Les différents types d’arrêts

Il y a arrêt… et arrêt. Selon la situation, le moment de la séance ou l’exercice que vous souhaitez demander ensuite, votre demande et la réponse de votre cheval ne seront pas les mêmes. Distinctions et explications :

  • Arrêt de travail : correspond à un arrêt bref (maximum 3 secondes, par exemple en reprise de dressage) demandé entre deux exercices en mouvement et exigeant du cheval qu’il maintienne son équilibre physique, qu’il reste attentif et qu’il soit prêt à repartir. Pour lui permettre de comprendre et l’aider à s’arrêter sans s’éteindre, appliquez les mêmes principes à votre présence : restez concentré.e, actif.ve et prêt.e à redémarrer dans votre corps et dans votre tête.
  • Arrêt de correction : correspond à l’immobilité proposée juste après avoir dû corriger une erreur de son cheval. Si par exemple, il vous dépasse et que vous lui demandez immédiatement (et calmement) de reculer une foulée pour lui permettre de comprendre son erreur, enchaînez sur quelques instants d’arrêt. Attention : vous venez de le corriger et risquez donc d’avoir une énergie active très (trop) présente ! Soufflez, centrez-vous. Il a fait une erreur, vous le lui avez expliqué : parfait, une belle opportunité d’apprentissage s’est présentée !
  • Arrêt de repos : correspond à un arrêt complet, neutre. Vous devez vous déconnecter (comme conseillé au chapitre 1 du présent Module) enlever toute pression physique, émotionnelle, visuelle de votre cheval et le laisser se détendre totalement. Si vous l’observez attentivement, vous verrez son équilibre changer, son encolure descendre. Il aura peut-être besoin de bailler, de mâchouiller à vider, d’expirer bruyamment : laisser-le se « remettre à zéro » et profiter complètement de vrai moment de repos.

Ces trois types d’arrêt sont utilisés au sol comme sous la selle. En fonction de la situation, ils nécessitent un type d’équilibre physique et mental différent mais un élément reste primordial quel que soit le contexte : votre cheval ne doit pas s’effondrer au moment de la transition à l’arrêt.

Travailler l’arrêt permet d’apprendre au cheval à fixer ses pieds, à trouver du réconfort en votre présence, à sortir de l’association « séance = fuite en avant » et à attendre d’être disponible physiquement et mentalement avant de pouvoir communiquer.

3. Exercices au pas

« La répétition est la mère de la maîtrise »

Parce que vous ne pouvez pas faire une séance complète à l’arrêt et que la majorité de vos manipulations quotidiennes (pansage, sortie du pré, aller-retours dans l’écurie…) se font au pas, parlons des exercices que tout binôme Homme – Cheval devrait maîtriser.

  • Synchronisation :  Lors du Module 3, nous avons vu que la synchronisation des activités est primordiale dans un groupe stable et qu’elle est intimement liée à la mise en place de relations affines fortes : il est temps de vous en inspirer ! Au début, faites l’effort vous-même de vous mettre au diapason de votre cheval afin d’attirer son attention… puis à son tour ! L’objectif est que marchiez à la même vitesse, au même rythme, que vous vous concentriez l’un et l’autre sur les foulées de votre partenaire.
  • Transitions dans l’allure : Si vous voulez alléger vos aides au sol et peut-être un jour, obtenir un galop en liberté à vos côtés, c’est ici que ça commence ! Avant tout, définissez votre pas de base, celui que vous pouvez maintenir côte à côte sans corrections incessantes. A partir de ce pas de base, variez l’allure et l’amplitude en cherchant à obtenir le pas le plus lent possible. Une fois cela acquis, même chose en cherchant à obtenir le pas le plus allongé possible sans tomber dans le trot : dès que vous obtenez une ou deux foulées d’accélération franche, reprenez le pas de base. Il ne faut jamais abuser d’un effort de votre cheval : vous risqueriez de l’encourager à s’économiser de plus en plus.
  • Changements de trajectoires : Dès que vous êtes synchronisés, variez les plaisirs ! Huits de chiffre, demi-tours, slaloms… Tout est possible. L’important est que vous soyez ensemble, que vous communiquiez et avancez côte à côte.
  • Changements d’œil : Pensez à changer régulièrement de côté, et à apprendre à travailler aussi bien à droite qu’à gauche de votre cheval. Selon votre niveau, cela peut vous demander un peu de temps d’adaptation mais n’oubliez pas : comment pouvez-vous demander à votre cheval d’être symétrique si vous ne l’êtes pas vous-même ?

 

Quel que soit l’exercice, l’enchaînement que vous préparez et la durée de votre séance, il y a des règles à respecter en permanence :

  1. Le cheval ne doit jamais s’effondrer sur l’humain, le bousculer ou le pousser. Si besoin, grandissez-vous, orientez votre corps vers lui et incitez-le à se redresser. Soyez suffisamment vigilant pour agir dès que vous sentez que son poids du corps penche vers vous.
  2. Les arrêts doivent être fréquents et confortables pour permettre au cheval de souffler, de se déconnecter, d’observer son environnement et d’adopter l’équilibre qui lui convient.
  3. L’attitude de l’humain influence celle du cheval. Attention aux gestes parasites : vos pieds qui freinent alors que vous demandez à votre cheval d’avancer, votre corps qui recule et l’aspire vers vous alors que vous lui demandez de ne pas vous bousculer, votre vitesse qui diminue alors que vous aimeriez un pas allongé. Là encore, soyez congruent !
  4. La répétition est mère de la maîtrise alors n’hésitez pas à demander ces exercices régulièrement… et pas seulement en carrière ! Variez les lieux (carrière, pré, place de pansage…) et les situations pour gagner en confiance et en fluidité.

 

Et s’il me dépasse ? Et s’il traine ?

Il y a plusieurs méthodes pour indiquer à votre cheval qu’il n’est pas positionné où vous aimeriez qu’il soit. Vous pouvez utiliser un code vocal ou des appels de langue pour l’inciter à vous rejoindre ou lui dire qu’il doit ralentir, tendre la longe vers l’avant ou vers l’arrière pour préciser la direction à prendre… Nous verrons plus précisément les méthodes à favoriser dans un prochain Module mais retenez déjà que l’important est d’être logique, progressif et bienveillant.

 

EXERCICE – MODULE 4 – CHAPITRE 4

Visionnez la vidéo illustrant ce Module puis

1. Testez les transitions dans l’allure et augmentez la difficulté en fonction de votre ressenti et de votre niveau.

  • Marcher – s’arrêter dès que vous êtes synchronisés et disponibles tous les deux
  • Marcher 10 foulées – Arrêt 3 secondes – Marcher 5 foulées – Arrêt long (=arrêt repos) – Recommencer
  • Pas de base – Pas lent 5 foulées – Pas de base 15 foulées – Pas lent 3 foulées – Arrêt de travail – Pas de base 5 foulées – Pas allongé 3 foulées – Pas de base 5 foulées – Arrêt : variez, osez, amusez-vous !

2. Prenez conscience des arrêts que vous proposez au cours de la séance, essayez de distinguer les trois types d’arrêt (travail / correction / repos) et concentrez-vous sur l’équilibre de votre cheval (et le vôtre) pendant et après chaque moment d’immobilité.